Reprendre le contrôle de notre démocratie libérale
Reprendre le contrôle de notre démocratie libérale
La démocratie libérale s’affaiblit. Le libéralisme, par sa promotion exacerbée de l’individualisme concourt à réduire la dimension collective de l’intérêt général, inscrite dans la notion de « démocratie ».
Une des causes profondes de ce divorce est à rechercher dans une dérive du libéralisme économique. L’équilibre entre capital et travail a été ébranlé par la transformation du capitalisme industriel en capitalisme financier et mondialisé. Notre modèle social y est mis sous pression, et la composante « travail » est ramenée à une simple variable d’ajustement. Ce libéralisme économique détruit petit à petit notre système d’économie libérale régulée socialement.
Cette perte d’équilibre se traduit par une érosion lente mais certaine de la classe moyenne, confrontée à une croissance inexorable des inégalités. Elle se traduit aussi par une dégradation du lien social. Dans son ouvrage « Les enfants du vide », Raphaël Glucksmann montre bien comment la citoyenneté s’estompe progressivement au profit de la seule logique individualiste. L’équilibre, savamment conquis, entre droits et responsabilités se trouve durablement dégradé dans une société consumériste où le citoyen est ramené à sa seule dimension de consommateur.
Ces évolutions sont le fruit de choix délibérément pris depuis des décennies dans les milieux économiques mais aussi gouvernementaux, tant de droite que de gauche. La dérégulation d’une série de secteurs n’a en rien permis un retour à la croissance des années 60 ni-même, et c’est plus grave, à contrôler et à enrayer les dettes faramineuses que les générations actuelles ont accumulées à charge de nos enfants et petits-enfants. Aucune fiscalité plus juste, aucun sursaut de performance des mécanismes de solidarité, aucune amélioration radicale du service public offert par un appareil d’Etat, pourtant toujours aussi imposant, ne sont venus y remédier. Les dettes publiques, sociales et environnementales ont explosé. Bruno Colmant parle à juste titre d’une « économie d’emprunt sur l’avenir ». Elle épuise les ressources de la planète et ses habitants.
Ce n’est pas être « Cassandre » que d’affirmer qu’à défaut de changer de logiciel, nos sociétés vont être très vite confrontées à de nouveaux désordres bien plus dévastateurs.
Face à ce défi, beaucoup ont déjà renoncé. J’affirme quant à moi que le politique, citoyens et décideurs, peuvent encore reprendre les rênes de la cité.
Le choix à opérer met en présence le retour à de vieilles recettes et la construction de solutions à la fois innovantes et réalistes. Ceux qui feront encore croire que le libéralisme économique permet par enchantement le ruissellement de la prospérité sur l’ensemble de la société se moquent du monde. Ils trompent tout autant que ceux qui prônent un nouvel étatisme et une sortie de l’économie de marché. Ils sombrent dans l’illusion de la toute-puissance de l’Etat.
En réalité, ni le libéralisme économique ni l’Etat ne sont en soi démocratiques. L’Etat reste en soi un monstre froid. Le libéralisme économique l’a d’ailleurs mis à son service au nom d’une émancipation individuelle exacerbée, il affaiblit nos enjeux collectifs de solidarité et d’efficacité sociétale.
De ces impasses ne sortira aucune solution aux crises financière, sociale et environnementale actuelles. Pour ma part, j’opte pour une démocratie radicale qui s’appuie sur les ressources de l’économie de marché tout en opérant comme régulateur puissant de celle-ci. Je fais le choix d’un libéralisme socialement responsable. Citoyens et décideurs ont à reprendre le contrôle de notre démocratie libérale, à réarticuler dans un nouveau contrat social l’émancipation individuelle et la responsabilité collective, la liberté d’entreprendre et la promotion de l’intérêt général dans lequel s’inscrit notre volonté de réorienter nos politiques économiques vers une économie éthique et une bio-économie, soucieuses de l’utilisation rationnelle de nos ressources naturelles.
Cela ne pourra devenir une réalité que si les responsables politiques retrouvent, au jour le jour, dans toutes les décisions qu’ils prennent, l’honneur de leur fonction : l’indépendance face aux diktats, lobbys et autres intérêts particuliers, la capacité à poser des choix courageux et de long terme.
C’est en reprenant le contrôle d’une démocratie libérale socialement responsable que citoyens et décideurs politiques se porteront à la hauteur du défi social et environnemental du 21ème siècle.
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