Bruxelles, la limite du rêve nationaliste

Bruxelles, la limite du rêve nationaliste

 

La sixième réforme de l’État est toujours en train d’être appliquée. Comment ça se passe ?

On rencontre un certain nombre de difficultés, d’abord dans la fiabilité des informations qui viennent dufédéral. Je ne vais pas jeter la pierre, tant pour l’ONSS que pour l’Onem, ce n’est pas évident. Ils doivent changer leurs paramètres et statistiques.C’est pareil pour l’Inami. Le gros souci, c’est vraiment le litige sur le déficit des hôpitaux. Il y a eu un couac de près de 200 millions qui pénalise les Régions et communautés. Chaque année, il risque d’y avoir 200 millions trop peu pour financer les hôpitaux. À Bruxelles, c’est 11 millions.

Pourquoi ça bloque ?

Ça coûterait 200 millions de plus au budget fédéral. Comme il doit déjà trouver trois milliards… Si aucune solution n’est trouvée avant fin 2016, il va y avoir un bug dans le financement des hôpitaux, qui vont présenter leurs factures. On pourrait avoir là un moment de tension important. Pour le reste, j’eus préféré qu’on ait eu le temps de préparer les textes législatifs et l’accueil des administrations. Tout ça doit se faire un peu dans la précipitation. Ça nous bouffe beaucoup d’énergie alors qu’on était dans le prévisible… Mais soit.

Et la 7e réforme, qui est revenue sur le devant de la scène récemment avec la N-VA ?

La revendication N-VA, c’est de dire : chaque peuple a le droit de disposer de lui-même. OK, pas de problème. Mais dans le même temps, la N-VA dit aussi : nous allons cogérer Bruxelles. La Flandre doit pouvoir disposer d’elle-même, mais pas Bruxelles ? Mettre Bruxelles sous cloche, c’est non. Bart De Wever dit quelque chose de juste, je ne l’accepte pas, mais si une majorité d’habitants souhaite l’autonomie, il est difficile de s’y opposer. Mais le paradoxe, c’est de dire que Bruxelles n’en a pas le droit. C’est inacceptable. Quand on a un principe politique, on l’applique aux autres, ou alors on ne l’applique pas à soi-même. Voilà la limite du rêve flamand nationaliste.

Pragmatiquement, n’y a-t-il pas certaines aberrations qu’on pourrait corriger ? Récemment, votre collègue Cécile Jodogne, secrétaire d’État au Commerce extérieur, était furieuse car elle avait découvert des décisions de Charles Michel dans la presse.

Il faut toujours réfléchir à deux fois avant de selancer dans une réforme institutionnelle, qui a toujours été synonyme de l’affaiblissement de la Belgique et des francophones. Les faits que vous évoquez relèvent d’un petit jeu politique et politicien qui s’est aussi exprimé durant l’annoncesur la voiture qui sera construite chez Audi. Ce qui montre que certains, au plus haut niveau, sont dans une logique de « Je vais tirer la couverture de mon côté ». Ce n’est pas malin, car celaaffaiblit tous les politiques et ça ne grandit personne. Et de manière générale, celui qui est en pole position, le Premier ministre, lorsqu’il fédère, s’attire plus de sympathie que lorsqu’ils’ingénie à vouloir jouer un mauvais tour à telle ou telle Région parce qu’elle est gérée par une fraction politique qui n’a pas son agrément. Je fais le parallèle avec le communal : si une majorité est homogène, ça profite toujours au bourgmestre et au premier échevin. Mais chacun peut avoir une appréciation. Je n’ai pas envie de me répandre là-dessus, je n’aime pas jouer « petits bras ». Ce qui s’est passé avec Audi étaitd’une certaine mesquinerie. Comme ça l’avait été avec le « Brussels lockdown ». On communiquesans donner toutes les informations, on donne des informations à certains mais pas à tous… Vous ne m’avez pas entendu sur ce dossier. J’aurais aussi pu faire de la surenchère, fermer Actiris, avoir mon nom dans la gazette. Tout ça ne fait que discréditer la classe politique.

(Source : article Le Soir du 30/01/2016 - ACB) 

La suite de l'interview : "La Région bruxelloise n'a pas été à la hauteur de la tâche sur les tunnels"